Page:D’Haussonville - Souvenirs et mélanges.djvu/49

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décrire ; c’était un enivrement. Il accablait sa famille de questions et ne se lassait pas d’entendre raconter les détails de ce qui s’était passé durant cette longue séparation ; il dut recommencer plusieurs fois lui-même le récit de ses aventures. Ses parents se montraient surtout curieux de la santé des Princes français, de ce qu’ils avaient fait, de ce qu’ils comptaient faire, de leurs chances de retour. Mon père les surprenait fort quand il assurait que les plus chauds partisans de la cause royaliste n’aspiraient plus guère qu’à rentrer en France. Les personnes au milieu desquelles il se retrouvait jugeaient plus sévèrement que lui le gouvernement du jour. Témoin de l’ordre merveilleux qui régnait alors à Paris, il était plus frappé du bien que le Consulat avait su accomplir en si peu de temps, qu’effarouché des vestiges encore restés debout du régime révolutionnaire. Il se sentait de la reconnaissance et du bon vouloir pour les hommes qui lui avaient rouvert les portes de la patrie.

Mon père avait connu dans le monde de Londres mademoiselle de La Blache, fille du comte de La Blache, député de la noblesse à l’Assemblée constituante. Mademoiselle de La Blache, fiancée pendant l’émigration à M. de Sombreuil, qui périt d’une façon si tragique à la malheureuse affaire de Quiberon, était rentrée à Paris pour recueillir l’héritage de son père ; elle y était alors retenue par des affaires qu’elle ne pouvait termi-