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LUDWIG VAN BEETHOVEN

Composer… ?

Combien est-il de gens, en France, — depuis qu’en notre pays latin on a abandonné les études latines — qui sauraient donner de ce terme une exacte définition ? À coup sûr la plupart de ceux qu’on appelle compositeurs en seraient tout aussi incapables que nos primaires…

Composer… componere : poser avec — établir ensemble — constituer côte à côte. Voilà pour le sens matériel, terre à terre du mot. Mais les latins attachaient à ce noble vocable un autre sens plus abstrait, contenant une idée de comparaison, d’étiage, de proportion et d’ordre,

Si parva licet componere magnis

qui en modifiait singulièrement la signification première. Et c’est cette acception seule qui doit être appliquée à l’œuvre d’art.

Nous ne pensons point nous écarter de notre sujet en examinant les diverses phases de ce travail d’enfantement. Par là nous pénétrerons plus profondément la pensée de notre héros, nous dévoilerons, autant qu’il est possible de le faire, le mystère de sa création artistique.

En toutes choses humaines, en art surtout, on distingue la matière et la forme. Formuler la matière musicale et l’ordonner de façon à la mettre en œuvre, n’est-ce pas là toute la composition ?

En musique, l’agent principal de l’œuvre est-ce que nous appelons thème ou idée. On peut en donner la définition suivante : l’idée musicale est constituée au moyen d’éléments sonores, fournis par l’imagination, choisis par le cœur, mis en ordre par l’intelligence.