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LUDWIG VAN BEETHOVEN

inspirations beethovéniennes est incontestablement celui qui s’étend au nord de la capitale autrichienne jusqu’aux pentes du Kahlenberg et du Leopoldsberg. Louant, pour l’été, une maisonnette à Döbling, Grinzing ou Heiligenstadt (qui n’étaient point encore promus au grade de faubourgs officiels), le maître n’avait que peu de chemin à faire pour se trouver en pleine campagne. Prenant à droite, peu après avoir dépassé les dernières maisons d’Heiligenstadt, il descendait dans la Wildgrübe, vallée verte et encaissée, par un sentier que l’on nomme aujourd’hui : Beethovengang, et s’arrêtait auprès du ruisseau de la VIe symphonie, le doux et ombragé Schreiberbach. Là, il se trouvait à peu près à égale distance des valses citadines et des chants paysans et il note dans plusieurs de ses œuvres cette bizarre antithèse. Voulait-il pousser plus loin ? Il traversait le ruisseau d’une enjambée, ou, au moment des crues, sur une planche branlante, et il gravissait, en pleine forêt, les pentes de la colline. Après s’être peut-être attardé à mi-côte, pour se rafraîchir au cabaret de la Main de fer, il allait chercher les campagnards chez eux, dans le village de Kahlenberg et déambulait parfois jusqu’à une lieue de là, au bourg rustique de Weidling. C’est donc toujours dans un tout petit espace de dix à quinze kilomètres soit au nord de Vienne, soit à Baden ou à Hetzendorf que furent pensées et écrites, au moins à l’état d’esquisses, non pas une symphonie pastorale mais dix symphonies pastorales, c’est-à-dire dix grandes œuvres, au moins, relatant les impressions de Beethoven en face de la nature.

Voici d’abord ; par ordre de dates, la charmante sonate pour piano, op. 28 (dite : pastorale, dans quelques édi-