« République de Platon », dont le grand musicien faisait, dit-il, sa lecture favorite, sans se douter que Beethoven ne pouvait, en 1803, connaître cet ouvrage, la première traduction allemande (par Schleiermacher) ayant paru à Berlin longtemps après que la Symphonie héroïque avait été exécutée à Vienne.
Beethoven, d’ailleurs, eût-il été platonicien, eût-il passé son temps, comme l’indiquent les cahiers de conversation, à bougonner impunément contre la Cour et la ville, à déclarer la police tracassière, la justice boiteuse, l’administration paperassière (quel Français de jadis ou d’aujourd’hui ne lui rendrait des points à cet égard ?), en quoi cela impliquerait-il des opinions républicaines au sens moderne du mot ? Sait-on s’il ne demandait pas au livre de Platon la théorie des anciens modes grecs plutôt qu’un modèle de constitution démocratique ? Il appartenait cependant à des écrivains de notre temps de renchérir encore sur l’hypothèse de Schindler et de nous présenter un Beethoven non plus seulement amoureux de la République de Platon, mais jaloux de célébrer la Révolution française en bloc, y compris les massacres de Septembre, la Terreur, etc… Tout ce qu’on sait des amitiés du maître et aussi de ses haines, de ses haines de patriote chassé de sa patrie par l’invasion révolutionnaire, s’élève contre une pareille interprétation. Le jacobinisme ne pouvait que répugner à son cœur honnête. Et l’hypothèse, conçue en dehors de toute préoccupation historique, n’a même pas l’excuse de s’étayer sur des dates. Car, à l’époque où, sous les ombrages d’Ober-Döbling, Beethoven écrivait et dédiait sa symphonie, c’est-à-dire de 1803 à 1804, ce n’était plus le porte-parole de la Révolution, le