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CÉSAR FRANCK

de loin en loin dans l’histoire, l’épopée que l’on ne rencontre qu’au cours des siècles dits de transition et dans des conditions particulières, fut longtemps, en effet, pour les peuples, la marque de passage d’une manière d’être établie à un nouvel état artistique et social.

Au sortir des influences purement mystiques et théocratiques qui abritèrent de tous temps le berceau des nations et des civilisations, s’ouvre toujours une ère de combats, héroïque dans l’antiquité, chevaleresque au moyen âge, précédant la période dans laquelle l’être humain, voire sa personnalité physique, devient l’objectif unique du mouvement social, jusqu’à l’avènement d’un nouveau cycle qui recommence et reproduit la marche des précédents.

C’est donc au milieu de la période de trouble, période de guerres gigantesques, de luttes intestines, d’actes sublimes et de crimes monstrueux que fleurit invariablement ce mystérieux lotus de la littérature que l’on nomme poème épique.

Telles, les épopées homériques, fixant la langue et la mythologie au seuil de la civilisation grecque, telle l’Énéide, lis croissant sur la limite même qui sépare le monde païen arrivé à l’état de scepticisme le plus complet de l’élan de foi enthousiaste sur lequel se greffa toute la grande civilisation chrétienne. Telle encore,