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CÉSAR FRANCK

vant s’adapter, en raison de sa nature expressive, au besoin de rêve et d’idéal qui subsistera toujours au fond du cœur de l’homme, quelque peine que se donnent les apôtres du dogme matérialiste pour l’en arracher.

Cet élément vivificateur fut la musique.

Et le XIXe siècle vit éclore, de Beethoven à Franck, en passant par Schumann, Berlioz et Wagner, un grand nombre de productions, sacrées ou profanes, qui ne sont autre chose que des poèmes épiques musicaux.

Épopée, la Missa solemnis où l’auteur des neuf symphonies raconte la vie du Christ, la grandeur de sa doctrine et la soif de fraternelle paix, rêve de l’âme moderne. Épopées incomplètes si l’on veut, mais au moins matière épique, ce Faust où Schumann paraphrase le gigantesque poème de Gœthe, et cette Damnation où Berlioz tente d’assimiler ce même poème à notre esprit français ; épopée, cette Tétralogie où Wagner recrée, pour la plus grande gloire de la musique, les mythes et les symboles des croyances septentrionales, comme Homère avait naguère condensé les légendes méditerranéennes ; épopée enfin ces Béatitudes, œuvre dans laquelle le « père Franck » raconte presque naïvement la bienfaisante action d’un Dieu tout amour sur les destinées humaines.