Dans ce poème musical, en effet, toutes les
conditions requises aux temps classiques pour
la constitution du poème épique, se trouvent
remplies : unité, grandeur, plénitude et intérêt
du sujet, appropriation du milieu et du poète,
celui-ci faisant œuvre de foi en un siècle ravagé
par l’incrédulité, croyant lui-même fermement à
ce qu’il narre, et s’imposant aux sceptiques eux-mêmes
au moyen du discours musical, moins
précis, mais plus universellement captivant que
le poème versifié. Les Béatitudes furent donc
l’œuvre attendue de la fin du XIXe siècle, œuvre
qui, en dépit de quelques défaillances inévitables
(aliquando bonus dormitat Homerus), restera
comme un superbe temple solidement fondé
sur les bases traditionnelles de la foi et de
la musique, et s’élevant au-dessus des agitations
du monde, en fervente prière, vers le
ciel.
Ainsi qu’il en est pour presque tous les grands monuments de l’art, l’éclosion des Béatitudes fut précédée, dans la vie de leur auteur, d’une longue, très longue période de préparation ; de même dans la Vita nuova trouve-t-on des présages de la Divine comédie, de même rencontre-t-on avec stupéfaction l’esquisse du thème qui servira de sceau à la IXe symphonie dans un