Aller au contenu

Page:D’Indy - César Franck, 1906.djvu/26

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
16
CÉSAR FRANCK

de sonorités, venait d’y installer son chef-d’œuvre, cet admirable instrument qui, après cinquante ans, a encore conservé toute sa fraîcheur de timbre et toute l’amplitude de son harmonieuse résonnance[1].

C’était bien autre chose que le modeste orchestre de Saint-Jean-Saint-François, aussi César Franck, poussé bien plus par l’intérêt artistique que par une pensée de lucre, se présenta pour le poste d’organiste de Sainte-Clotilde (où il occupait depuis 1858 celui de maître de chapelle) et finit par l’obtenir malgré les intrigues de ses nombreux compétiteurs.

C’est dans la pénombre de cette tribune, dont je ne puis me souvenir moi-même sans émotion, que s’écoula la meilleure partie de sa vie, c’est là que, pendant trente ans, chaque dimanche, chaque jour de fête et les derniers temps, chaque vendredi matin, il vint attiser le feu de son génie en d’admirables improvisations souvent bien plus hautes de pensée que nombre de morceaux de musique ciselés avec adresse, c’est là, assurément, qu’il prévit et enfanta les sublimes mélodies qui devaient former la trame musicale de ses Béatitudes.

  1. « Si vous saviez comme je l’aime », disait le « père Franck » au curé de Sainte-Clotilde, « il est si souple à mes doigts et si docile à mes pensées ! » Propos cité dans l’allocution de M. le chanoine Gardey, le 22 octobre 1904.