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L’ARTISTE ET L’ŒUVRE MUSICAL

bien qu’elle soit peu conforme à la justice ; toutefois, tenu de faire ici œuvre de critique, je dois m’interdire tout jugement rendu sous l’influence de l’amour que je porterai toujours à mon maître regretté, jugement qui, dans ce cas, ne pourrait qu’être partial, et j’aurai le courage de dire que la première manière de Franck, tout en présentant certaines particularités infiniment intéressantes, fut loin de laisser présager tout ce que l’art du maître était appelé à produire par la suite de grand, de neuf, de sublime.

Certaines compositions typiques mises à part, les influences, dans ce premier style, absorbent une notable partie de la personnalité, Beethoven dans les trios, Liszt et les pianistes romantiques dans les pièces pour piano, Méhul enfin et les Français de la fin du XVIIIe siècle dans toutes les œuvres vocales. Ces influences sont surtout sensibles dans le tour mélodique général et dans la disposition ; quant au rythme synthétique, à l’architecture musicale, points capitaux des deux styles subséquents, il n’en est pas encore question dans cette première période. Bien mieux, on constate avec étonnement un certain embarras, une sorte de timidité dans la structure de la plupart des œuvres, timidité qui a souvent pour effet la plus flagrante monotonie et devient même parfois une cause d’erreurs que Franck