Page:Dabit - L'hotel du nord, 1929.djvu/33

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rait avec une coquetterie naïve. Elle arrivait toujours trop tôt ; elle devait faire les cent pas sur le trottoir de l’usine. Enfin, son amant paraissait, ils s’embrassaient à pleine bouche.

— Pierre, on rentre à pied, chuchotait Renée.

Il lui passait un bras autour de la taille et la laissait jaboter. Ils musardaient aux étalages des magasins, s’arrêtaient aux carrefours pour écouter la chanson en vogue. C’est ainsi que Renée fit la découverte de Paris.

Les premiers mois, le samedi, Trimault la conduisait au cinéma. Mais c’était un homme bilieux, despotique, qui se déprenait de ses conquêtes. La pauvre était sans malice et quand Trimault eut bien usé d’elle, un matin, après une scène :

— Ma petite, j’en ai marre de t’entretenir !

Renée avait 22 ans. Elle n’était ni belle, ni laide, ses joues rebondies sentaient encore la campagne. Sa jeunesse avait été malheureuse et soumise. Trimault se montrait égoïste. Soit, elle travaillerait pour lui plaire.

Elle s’engageait dans la vie sans avoir souci du bien ni du mal. Elle admirait les