Page:Dabit - L'hotel du nord, 1929.djvu/34

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femmes qu’elle croisait dans la rue. Les unes surgissaient devant elle parées comme des idoles, les autres, quelquefois de très jeunes filles, se glissaient au milieu des hommes avec un sourire provoquant et elle enviait leur hardiesse. Elle prit honte de son teint halé et se poudra, elle se mit du rouge aux lèvres et sa bouche se dessina comme un beau fruit sur lequel elle passait sa langue. Elle consultait avidement les catalogues des magasins ; parfois, avant d’aller chercher Pierre, elle faisait un petit tour au « Printemps » ou aux « Galeries ». Sa robe des dimanches lui semblait bien laide…

Maladroite à plaire, elle tenait à son amant qui lui avait révélé sa beauté. Par un obscur besoin de s’émerveiller elle restait devant l’armoire à glace à s’éblouir de son visage. Elle inventait de nouvelles coiffures, et chaque jour se fardait un peu plus. Son corps lui causait des surprises. Elle aimait à le comparer aux nudités des cartes postales qu’elle volait dans les poches de Trimault. Ces rapprochements l’exaltaient puis lui inspiraient une jalousie torturante. Le travail imposé par Pierre, c’était, elle le sentait bien, leur amour qui déclinait. Elle se rha-