Page:Dabit - L'hotel du nord, 1929.djvu/41

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une solennité rituelle, il crachait dans la sciure qui couvrait le carrelage.

Lecouvreur, qu’ils obligeaient à jouer avec eux, se levait dès qu’il pouvait, pour remplir les verres. Ce jeu l’excédait. Toujours les mêmes discussions, les uns qui en tiennent pour « l’amer », les autres pour « l’anis », celui-ci qui est « unitaire », celui-là qui est « cégétiste », et tout ça vociféré comme si le sort du monde devait en dépendre.

Pendant qu’il jouait, Louise, au comptoir, servait les clients.

Le père Deborger commandait un bordeaux rouge, Dagot un vieux bourgogne. Constant, le typographe, exposait les raisons pour lesquelles il avait lâché sa maîtresse, à Benoît, un armurier :

— Une salope ! répétait-il, ponctuant ces mots de coups de poing sur le « zinc ».

Auprès du poêle s’installaient Volovicht et sa femme, ancienne pupille de l’Assistance. Le mari, grand blessé de guerre, commandait un café nature, sa femme un café rhum ; les jours de paie, ils buvaient tous deux un grog carabiné.

Vers 11 heures, la porte claquait et entrait en chantonnant Gustave, le pâtissier. Il était