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LE VERGER

nouvelle de leur âme ? Ils arpentaient le corridor mal éclairé et leurs ombres se nouaient et se dénouaient sur le mur au badigeon gris.

Noël touchait la porte du collège. Il revint en courant :

— J’oubliais le livre de Louise.

Il tendit à Jacques une lettre de Maurice et un volume enveloppé dans un papier blanc.

— Nous nous sommes rencontrés chez le libraire, Louise, Maurice et moi. Il paraît que c’est ton anniversaire de naissance ces jours-ci. Nous avons décidé de t’offrir un cadeau. Louise a prêté l’idée, Maurice a suggéré le Grand Meaulnes et moi, je suis le messager des dieux. Bonjour, mon très cher !

Sur ce, il lui tira une révérence et pivota sur ses talons.

Jacques déposa le Grand Meaulnes chez le Père Préfet pour demander l’Approbatur et ouvrit la lettre de Maurice. « Je n’avais pas coutume de t’écrire pour ton anniversaire de naissance. Noël t’aura dit pourquoi j’ai pensé à toi. Il t’a appris sa décision ; c’est grand, n’est-ce pas ? Je suis fier d’avoir Noël pour ami. Il m’a semblé que notre amitié était menacée. Que de traits nous pourrions nous rappeler : nos chicanes de terrain, rue Charlevoix, nos excursions à bicyclette, nos séances de placotage dans ma chambre quand nous avons découvert Pascal auquel tu m’as initié ! Jacques, mon ami, on ne nous enlèvera pas le plus clair de nos souvenirs. Mais pourrons-nous restaurer ces moments précieux et affronter la vie ensemble ? Chaque fois que je t’ai écrit (ce furent de trop rares fois), je l’ai fait dans des états