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LE DROIT NATUREL.

CHAPITRE I. — ce que c’est que le droit naturel des hommes.


Le droit naturel de l’homme peut être défini vaguement : le droit que l’homme a aux choses propres à sa jouissance.

Avant que de considérer le droit naturel des hommes, il faut considérer l’homme lui-même dans ses différents états de capacité corporelle et intellectuelle, et dans ses différents états relatifs aux autres hommes. Si l’on n’entre pas dans cet examen avant que d’entreprendre de développer le droit naturel de chaque homme, il est impossible d’apercevoir même ce que c’est que ce droit[1].

C’est faute d’avoir remonté jusqu’à ces premières observations, que les philosophes se sont formé des idées si différentes et même si contradictoires du droit naturel de l’homme. Les uns, avec quelque raison, n’ont pas voulu le reconnaître ; les autres, avec plus de raison, l’ont reconnu ; et la vérité se trouve de part et d’autre. Mais une vérité en exclut une autre dans un même être lorsqu’il change d’état, comme une forme est la privation actuelle d’une autre forme dans un même corps.

Celui qui a dit que le droit naturel de l’homme est nul, a dit vrai[2].

Celui qui a dit que le droit naturel de l’homme est le droit que la nature enseigne à tous les animaux, a dit vrai[3].

  1. Il en a été des discussions sur le droit naturel, comme des disputes philosophiques sur la liberté, sur le juste et l’injuste : on a voulu concevoir, comme des êtres absolus, ces attributs relatifs, dont on ne peut avoir d’idée complète et exacte qu’en les réunissant aux corrélatifs dont ils dépendent nécessairement, et sans lesquels ce ne sont que des abstractions idéales et nulles.
  2. Voyez-en l’exemple à la fin de ce chapitre.
  3. C’est la définition de Justinien ; elle a, comme les autres, son aspect où elle est vraie.