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Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/304

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qu’il avait été fait chef de canton. Devenu chrétien, il continua l’exercice de sa charge. Il pratiquait avec ferveur la religion, se livrait avec assiduité à la prière et aux lectures pieuses, instruisait avec soin sa famille et vivait en parfaite harmonie avec tout le monde. En l’année pieng-tsin (1796), il fut arrêté et conduit à la préfecture de T’sieng-iang où il eut à supporter les plus violents supplices. On en vint jusqu’à lui brûler de la feuille d’armoise sèche sur l’anus, mais rien ne put lui faire renier sa foi. On fit rougir au feu un soc de charrue, et on lui ordonna de quitter sa chaussure et de marcher dessus. Il allait obéir, quand on l’arrêta en disant qu’il était fou ; c’était la sainte folie de la croix. Thomas fut condamné à mort. Trois jours avant l’exécution, on lui barbouilla le visage avec de la chaux, et on lui fit faire trois fois le tour du marché au son du tambour. Sur ces entrefaites, le mandarin de T’sieng-iang ayant été cassé, l’affaire fut différée jusqu’à l’arrivée de son successeur, malgré les instances de Thomas qui demandait l’exécution de la sentence. Le nouveau mandarin, après avoir examiné les pièces du procès, fit sortir de prison le confesseur, en le plaçant sous caution dans la maison d’un particulier, et quelques jours après, lui fit ordonner de sortir du territoire de sa préfecture, Thomas, désolé de n’avoir pu obtenir la couronne du martyre, s’en alla en gémissant, et répétant à tous, qu’il n’avait pas eu de bonheur, et que désormais, pays, maison, famille, n’étaient plus rien pour lui. Il habita successivement dans les districts de Pou-ie, de Keum-san et de Ko-san, s’appliquant à l’instruction des chrétiens, et vivant dans un dénûment complet de toutes choses. Si les fidèles lui donnaient des habits ou des souliers neufs, il disait que les beaux habits entretiennent l’orgueil, et changeait de vêtements avec le premier pauvre qu’il rencontrait. Il ne faisait souvent qu’un repas par jour, et sa nourriture était des plus grossières.

En l’année 1801, la persécution étant devenue plus violente, Thomas conduisit sa famille dans les montagnes : « Attendez là, dit-il, l’ordre de la Providence. Pour moi, j’ai toujours dans le cœur le regret de n’avoir pas souffert le martyre. L’occasion est belle, je vais me livrer. » On lui représenta que sans lui, toute sa famille mourrait de faim, et que, d’ailleurs, lui aussi devait attendre l’ordre de Dieu. Ce fut à grand’peine qu’on parvint à le retenir. Il conservait toujours l’espoir d’obtenir la grâce du martyre, mais Dieu exauça ses vœux d’une autre manière. Quelques jours après, à la septième lune de cette même année 1801, il tomba malade à Han-ko-ki, au district de Liong-tam. La veille