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ton père aux cheveux blancs ? — Mon père, répondit Martin, je n’oublie point les devoirs de la piété filiale. Sans doute, ma conduite paraît bien peu généreuse, mais vous êtes chrétien comme moi, et nous devons voir les choses de plus haut. Serait-il juste, en cédant à des affections naturelles, de renier notre Père qui est aux cieux ? Jugez vous-même. »

Dieu sembla récompenser cette foi héroïque par le don des guérisons. En effet, quoique Martin eût une certaine connaissance de la médecine, il est difficile d’expliquer naturellement ce fait, attesté par des témoins oculaires, que tous les malades qui vinrent le consulter dans sa prison s’en retournèrent guéris. Sa réputation s’était étendue au loin ; les malades arrivaient en foule, au point que la porte de la prison ressemblait à une place de marché. Le mandarin n’osait s’y opposer, car plusieurs de ses propres serviteurs avaient été guéris. Josaphat Kim Ken-sioun-i, interrogé sur les guérisons opérées par Martin, répondait alors même, pour ne pas faire trop d’éclat, que sur dix infirmes huit ou neuf guérissaient ; mais il a avoué depuis que les guérisons étaient de dix sur dix, de cent sur cent, et que pas un malade ne se retira sans une cure complète. Les geôliers demandaient à voir ses livres de médecine, Martin leur répondit : « Je n’ai aucune formule à moi, seulement je sers le Maître du ciel. Si vous voulez étudier la médecine, il faut d’abord commencer comme moi par croire en Dieu. — Mais vous prétendez avoir brûlé tous vos livres, comment pourrions-nous apprendre ? » Martin dit en riant : « J’ai dans le cœur des livres incombustibles qui suffisent amplement pour vous instruire, et vous apprendre à pratiquer la religion. »

Fatigués de leur longue détention et des continuels supplices qu’il leur fallait subir, plusieurs prisonniers chrétiens se laissèrent peu à peu gagner par la tiédeur et le découragement. Martin Ni, toujours enflammé de zèle, ne cessait de les exhorter et encourager. « Nous avons été pris en même temps, leur disait-il. Quel bonheur si tous nous pouvions mourir le même jour pour Dieu ! » Mais ses efforts et les prières de ses fervents amis n’eurent pas un plein succès, et un certain nombre de leurs compagnons de captivité achetèrent la délivrance, en prononçant une formule d’apostasie. Pour consoler ceux qui restaient. Dieu permit qu’un des geôliers, touché de la grâce, se convertît alors même, et devînt un fervent chrétien.

À la dixième lune de l’année 1800, les confesseurs furent cités devant le gouverneur de la province, qui essaya tout d’abord de