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façon à cacher le plan et les détails de cette nouvelle tentative à la majorité des néophytes. Mais il fallait de l’argent, et l’argent manquait. On essaya d’abord de s’en procurer en plaçant quelques fonds dans une entreprise commerciale qui promettait de larges bénéfices ; mais cette entreprise manqua, et les avances furent perdues. On fit appel à la générosité des chrétiens de la capitale et des provinces, et, enfin, après des retards interminables, tout fut prêt pour envoyer des lettres à l’évêque de Péking, vers la fin de 1811[1].

Outre les chrétiens influents nommés plus haut, on cite comme ayant pris une grande part à cette affaire : Justin Tsio Tong-siem-i, qui y contribua du fond de son exil, et Thomas Han, du district de Mien-tsien dans le Nai-po, qui fournit une assistance matérielle relativement considérable.

Deux lettres furent donc rédigées, l’une à l’évêque de Péking, pour lui raconter tout ce qui s’était passé, et le supplier d’envoyer un prêtre au secours de ses enfants de la Corée, et l’autre au souverain Pontife. On croit que ce fut Jean Kouen qui les écrivit au nom de tous les chrétiens. Elles sont signées : François et autres…, probablement un nom d’emprunt, pour dérouter les recherches des mandarins dans le cas où ces lettres eussent été saisies en route.

Chargé de ces dépêches, Jean Ni, accompagné d’un autre chrétien dont nous ne connaissons pas le nom, se mit en route à la suite de l’ambassade, et arriva heureusement à Péking. Mais il ne savait où trouver les chrétiens, et n’osait adresser de questions à personne. Se souvenant alors que le mode de préparation du tabac avait été introduit en Chine par les missionnaires, et que dans le commencement, c’étaient des chrétiens qui en faisaient le commerce, il se mit en quête d’un marchand de tabac. La Providence permit qu’il rencontrât une de ces boutiques, sur la porte de laquelle n’étaient peints aucuns caractères superstitieux. Il y entra avec confiance, et après une courte conversation, découvrit que le marchand était chrétien. Il se fit reconnaître lui-même comme tel, et demanda à être conduit près de l’évêque.

  1. Mgr Daveluy penche à croire qu’il y a là une erreur, et que les lettres écrites vers la fin de l’année kieng-o (1810-1811) arrivèrent à Péking au commencement de 1811. En cela, il se trompe, car non-seulement toutes les copies existantes de ces lettres sont datées de l’année sin-ou (1811-1812) mais l’arrivée des deux néophytes de Corée, n’est mentionnée que dans la lettre écrite en décembre 1812 par M. Richenet, lazariste français, à M. Chaumont, supérieur du séminaire des Missions-Étrangères. Une lettre de l’année précédente, du même au même, n’en parle pas.