Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 1.djvu/518

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

époque, la femme et les enfants d’Augustin avaient été emprisonnés. Mis plus tard en liberté, ils furent reconduits à Ma-tsaï par un païen, parent éloigné d’Augustin. Là, abandonnés sans ressources, sans nourriture, ils furent secourus par un homme du peuple, auquel, plus tard, Paul put payer sa dette de reconnaissance. Lors de la mort de son père et de son frère, Paul était âgé seulement de six ou sept ans ; son jeune âge l’avait fait épargner, ou plutôt Dieu le réservait pour l’exécution de ses desseins. Baptisé dans son enfance par le P. Tsiou, et couvert, pour ainsi dire, du sang des martyrs, il persista avec sa mère et ses sœurs dans la pratique fidèle de ses devoirs religieux. Mais la famille Tieng que la persécution avait proscrite et ruinée, et dont plusieurs membres étaient encore en exil, tremblait au seul nom du Christianisme, et ne pouvait leur pardonner la pensée de vouloir continuer de semblables exercices. Elle fit donc tous ses efforts pour empêcher Paul et les siens de vaquer désormais au service de Dieu. Reproches amers, menaces, mépris, dérisions, mauvais traitements même, tout fut mis en jeu. Paul tint bon toutefois contre ces indignes menées, et persévéra envers et contre tous. Il fallait que le malheur et les contradictions vinssent éprouver et fortifier cette âme d’élite dont toute la vie devait se passer dans les peines et les sacrifices.

Cependant, il ne restait plus dans la maison aucun livre religieux, et Paul ne put acquérir qu’une instruction bien superficielle, par les explications orales de son excellente mère. Toute communication avec les chrétiens lui étant strictement interdite, il gémissait en silence, songeait aux moyens de s’instruire, et surtout, priait avec ferveur. Arrivé à l’adolescence, il eût pu, malgré la ruine de sa maison, trouver facilement quelque parti honorable, à tout le moins parmi les familles qui avaient été proscrites comme la sienne ; et les belles qualités de l’esprit et du corps dont il était doué, l’eussent mis à même de subvenir aisément à ses besoins, tout en pourvoyant au salut de son âme. Mais son grand cœur était loin de songer au mariage ; ses nobles penchants le portaient plus haut ; sa seule pensée, sa seule ambition était de travailler à l’introduction des prêtres, et, en se sauvant lui-même, de procurer, quoi qu’il en dût coûter, le salut de ses frères dans la foi.

Ne pouvant supporter plus longtemps les vexations de sa famille, il prit la résolution de s’évader, et laissant momentanément à la garde de Dieu sa mère et sa sœur, il se retira chez deux pauvres chrétiens, près desquels il mena quelque temps une vie excessi-