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Étienne, encore à la mamelle, que son sein épuise par les supplices ne pouvait plus nourrir. Cet enfant prédestiné mourut de faim dans la prison, et s’envola au ciel grossir le nombre des Saints innocents, comme lui martyrs de Jésus-Christ.

Emérence Ni, sœur de Pierre Ni Sioun-pin-i, d’une famille honnête du district de Niei-san, avait été mariée à un païen. Mais à l’âge d’environ vingt ans, ayant entendu parler de la religion chrétienne par son frère, elle y crut de tout son cœur, s’abstint dès ce moment de toutes superstitions, et se mit à garder les jeûnes et abstinences de l’Église. Son mari, s’en étant aperçu, entra dans une grande fureur, et l’accabla de mauvais traitements ; souvent il la frappait au point de lui enlever l’usage de ses membres. Un jour, au milieu des froids et des neiges de l’hiver, il la dépouilla de ses habits, la suspendit en plein air, et la laissa ainsi pendant plusieurs heures. Ces épreuves durèrent cinq ou six ans, mais Emérence, ferme dans sa foi, endurait tout avec douceur, et conservait un caractère humble et obéissant. Sa fidélité à accomplir les devoirs de la piété filiale envers son beau-père et sa belle-mère, faisait l’admiration de tous ceux qui la connaissaient. Profitant de chaque occasion pour faire comprendre à son mari la vérité du christianisme, elle eut enfin le bonheur de le convertir. Les deux époux émigrèrent ensemble dans les montagnes pour pratiquer plus librement la religion, et Emérence vit son mari, baptisé à l’heure de la mort, expirer dans les sentiments de la foi la plus vive. Devenue veuve, elle se retira auprès de ses frères, avec son jeune fils. À la persécution de 1839, elle refusa de fuir pour éviter le danger, et fut prise avec les autres chrétiens à Sou-ri-san. En montant à la capitale, elle fit évader son fils, puisse présenta courageusement au tribunal où elle subit à plusieurs reprises, sans ouvrir la bouche, les plus cruels supplices. Son corps avait été mis dans un état affreux, et, comme les autres chrétiens la plaignaient et cherchaient à la consoler, elle leur dit : « Par mes propres forces que pourrais-je supporter ? mais avec le secours de Dieu, je puis tout. Ne savez-vous donc pas que de grandes souffrances procurent un grand bonheur ? » Bientôt ses chairs meurtries se corrompirent, et il s’y engendra quantité de vers. La faim et la soif vinrent encore augmenter ses souffrances, et trois jours après le dernier interrogatoire, elle mourut dans la prison à l’âge de trente-neuf ans.


Cependant, grâce aux manœuvres des traîtres et aux révélations des apostats, tous les secrets des chrétiens avaient été