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Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 2.djvu/177

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appointements du roi, oses-tu bien faire ce qu’il prohibe ? De qui as-tu appris cette religion ? Qui as-tu endoctriné ? Remets tes livres entre mes mains. — J’ai été converti, » répondit Augustin, « par Paul Ni décapité pour la foi il y a douze ans ; mais je n’ai pas même réussi à instruire ceux de ma maison ; à plus forte raison, n’ai-je pu le faire pour d’autres. Quant aux livres, je n’en ai pas. — Il n’y a pas une seule maison qui ait autant de livres que la tienne, et tu dis ne pas en avoir ? » Et de suite, il lui fit donner la question à cinq reprises différentes. Auparavant, Augustin tremblait à la seule pensée des supplices ; depuis son arrestation ses craintes avaient disparu.

L’évêque venait d’être pris et la présence des autres prêtres était bien connue. Dans le prétoire on débitait sur eux mille calomnies, et on avait des soupçons étranges sur le motif qui les avait amenés en Corée. Le juge demanda donc quelques explications à Augustin. Celui-ci profita de l’occasion pour réfuter ces stupides calomnies, et dit : « L’unique raison de la venue des docteurs européens dans notre royaume, c’est d’étendre la gloire de Dieu, et d’apprendre aux hommes à l’honorer par l’observation des dix préceptes, et à sauver leurs âmes. En prêchant cette doctrine, ils font éviter les peines éternelles de l’enfer après la mort, et jouir dans le ciel d’un bonheur sans fin. Mais comment pourraient-ils persuader aux autres cette suprême sagesse, s’ils n’étaient les premiers appliqués au bien ? Aussi, est-ce seulement après s’être exercés longtemps à pratiquer la vertu, et après y avoir fait de grands progrès, qu’ils vont évangéliser les pays étrangers. Si, comme on le leur impute, ils cherchaient les honneurs, les richesses et les plaisirs de la chair, pourquoi abandonner l’Europe leur patrie, pays magnifique et opulent ? Pourquoi venir ici, à quatre-vingt-dix mille lys, à travers des dangers tels, que neuf sur dix de ceux qui les affrontent périssent infailliblement ? D’ailleurs, quand un homme est revêtu du véritable sacerdoce, quelle plus haute position pourrait-il ambitionner ? Comment dire qu’ils cherchent nos richesses, puisqu’ils apportent de leur pays l’argent nécessaire à leur usage ? Avant d’être élevés aux saints ordres, ils jurent et font vœu devant Dieu de conserver leur corps pur et de garder la continence jusqu’à la mort ; voyez-vous en cela le désir des plaisirs de la chair ? » Il continua ainsi à répondre d’une manière victorieuse à toutes les imputations. Puis le juge lui dit : « Qui a amené cet étranger dans notre pays ? — C’est moi, » répondit-il. Interrogé ensuite sur les deux prêtres, il n’ouvrit plus la bouche et souffrit la torture avec