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Page:Dallet - Histoire de l'Église de Corée, volume 2.djvu/487

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parole en désaccord avec les ordres qu’il reçoit est punie de la dégradation et même de l’exil.

« La Corée n’a qu’un journal manuscrit, et encore n’est-il que pour la capitale. Les nobles qui y sont abonnés le parcourent quelques instants, et le rendent de suite à l’estafette qui attend à la porte pour le recevoir et aller le communiquer aux autres souscripteurs. Dans ce journal il y a chaque année, au retour des ambassadeurs, une espèce de rapport sur ce qu’ils ont entendu dire en Chine. Autrefois, cette feuille officielle du gouvernement ne pouvait nommer un peuple d’Europe sans y accoler le mot barbare ; des actes que d’ailleurs nous savions être justes et glorieux y étaient traités de vilenies, de cruautés ; les succès européens étaient invariablement transformés en échecs et en désastres. Depuis le traité de Chine, le style de ce journal change peu à peu, on y voit plus de civilité, plus de réserve, et plus de justice rendue aux Européens. Cette année, on les a dépeints comme amis du Céleste Empire, et même comme aidant le régent à se tirer d’embarras avec les rebelles. Mais ces rapports officiels sont très-courts, et surtout ne parlent pas de religion. Les ambassadeurs cependant en ont souvent causé dans leurs salons de réunion. J’ai vu une lettre du vice-ambassadeur qui rapporte au long la promulgation des édits concernant la liberté religieuse ; il insinue même que le régent de Chine et son pupille auraient l’intention de se faire chrétiens. Je ne crois pas que cette dernière nouvelle soit vraie ; mais qu’elle le soit ou non, dès le moment que les ambassadeurs en sont les porteurs, elle serait très-utile à nos néophytes, si elle était connue. Mais on se garde bien de la faire circuler dans le public.

« Quoi qu’il en soit, le gouvernement s’obstine toujours à agir comme par le passé. Il ne provoque pas de persécution générale, mais il voit avec assez d’indifférence que les mandarins, dans leurs districts respectifs, nous fassent la guerre. Si on fait trop de bruit, il pourra conseiller d’agir plus doucement, mais il se garde d’interdire toute poursuite ; au contraire, tant qu’il ne rapporte pas les lois qui condamnent les chrétiens à mort, la persécution est parfaitement légale. Si nous ne souffrons pas davantage, c’est parce qu’une grande partie des mandarins n’exécutent pas la loi ; mais du moment qu’un subalterne cupide et cruel arrive dans un district, la guerre contre les chrétiens commence dans ce lieu, sans que le gouvernement réclame, sans même qu’il en ait connaissance. L’hiver dernier a été encore signalé par plus d’une misère de ce genre, mais surtout deux