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sions pas si tôt. Il craignait que notre barque ne fût arrêtée au port de Fougan et envoyée à Forntiose, par ordre du vice-roi. Enfin nous entrâmes au port, le 1er de mars, lorsqu’on annonça officiellement que les troubles de Formose étaient apaisés.

« Rien n’égale la charité que Mgr du Fokien a montrée pour nous et pour moi en particulier. Nous nous sommes trouvés chez lui jusqu’à quatorze, en y comprenant les courriers ; quelques-uns y ont passé plusieurs mois. Il a pourvu généreusement à tous nos besoins, il s’est donné des soins pour nous faire continuer sûrement notre voyage. Du reste, ce n’est pas envers nous seulement qu’il s’est montré si généreux, il a rendu les mêmes services aux missionnaires qui nous ont précédés et à ceux qui nous ont suivis ; il les invite même à passer par son vicariat. Une conduite si noble et si digne d’un évêque catholique, lui a mérité les éloges et les remercîments de la Propagande ; il est cependant peu riche, mais, malgré ses faibles ressources, il donne beaucoup aux pauvres. Quelquefois nous lui manifestions la peine que nous éprouvions en voyant les dépenses qu’il faisait, soit pour nous, soit pour les autres ; il nous répondait seulement : Deus providebit : le Seigneur y pourvoira.

« Le 9 mars, M. Maubant vint m’annoncer qu’il renonçait à la mission du Su-tchuen, pour m’accompagner en Corée. « Il y a longtemps, me dit-il, que j’ai cette pensée ; mais j’ai voulu, avant de la déclarer, l’examiner sérieusement. » Surpris de cette démarche, mais ne voulant rien prendre sur moi, je convins avec lui que nous irions ensemble consulter Mgr du Fokien. Ce prélat ayant entendu les raisons pour et contre, pensa que non-seulement il était bon, mais même nécessaire, en quelque manière, que M. Maubant allât en Corée. Nous écrivîmes à l’instant à Mgr du Su-tchuen pour le prier de consentir à ce changement de destination ; nous confiâmes nos lettres à un courrier qui allait partir pour cette province, et, le même jour, M. Maubant s’achemina vers Hing-hoa, petit district du Fokien confié à notre Société. De peur que l’arrivée soudaine de plusieurs Européens dans la province du Kiang-nan, qui n’en avait pas vu un seul depuis bien des années, n’excitât une persécution, il fut convenu que M. Maubant me laisserait prendre les devants, et me suivrait quelque temps après. Quinze mois plus tard, je reçus une lettre de Mgr de Sinite, vicaire apostolique du Sutchuen. Ce prélat me disait : « La Corée a encore plus besoin de missionnaires que nous. Nous aurions bien désiré que M. Maubant fût venu exercer son zèle dans notre mission ; cependant