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Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/171

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ceux ci, dis je, peuvent ſe permettre l’amuſement du ſpectacle. Comme le repos eſt néceſſaire aux fatigues du corps, de même l’esprit épuiſé par le travail, demande à être delaſſé : mais ce n’eſt point par un plaiſir phiſique tel que le ſommeil, c’eſt par l’eſprit ſeul que l’eſprit peut être ranimé.

L’ame eſt un feu qu’il faut nourir,
Et qui s’éteint s’il ne s’augmente :

a ſi bien dit M. de Voltaire. Combien n’avons nous pas de profeſſions dans les quelles l’eſprit eſt néceſſaire ? Combien n’avons nous pas de gens d’esprit qui les éxercent ? La plûpart vous diront qu’après ſix ou ſept heures de travail, leur cerveau ſe deſſeche, leur imagination ſe tarit : ils ne gagneroient rien à lutter contre l’épuiſement & la fatigue de l’un & de l’autre. L’étude fatigue l’esprit, mais en ſi peu de tems que des vingt quatre heures du jour, n’en aiant pu donner que ſix ou huit au travail, il en reſte toujours ſeize ou dix huit à emploier ; les emploiera-t-on à dormir ? Non ſans doute. Qu’on en donne trois à un amuſement qui remettra l’eſprit dans ſon aſſiette, qui l’enrichira ſouvent de nouvelles idées, & qui d’un homme d’eſprit & de goût pourra faire inſenſiblement un ſage ; ces trois heures, ce me ſemble, ne ſeront pas les plus mal emploiées des dix huit de loiſir qui lui reſtent.

Ce n’eſt pas à vos heureux Montagnars à