Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/203

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la juſtice, de porter des Armes quelconques.

Cette loi, j’en conviens, eſt terrible, elle eſt même injuſte en un ſens, puisqu’elle ſemble lier les mains de l’agreſſeur vis à vis de l’offenſé : mais c’eſt dans cette injuſtice même que conſiſteroit ſon efficacité ; c’eſt un reméde violant, mais que la nature du mal obligeroit d’emploier. Cette loi terrible contiendroit les faux braves, même par le défaut d’équité qu’on peut lui reprocher. Il n’eſt perſonne qui ne tremblât dans une dispute, d’être reconnu pour agreſſeur ; & pour échaper à cette qualification on attendroit toujours d’être inſulté. Le bénéfice de la loi ſeroit toujours préférer la qualité d’offenſé à celle d’offenſeur. Si l’on oſoit ſe battre tête à tête, & que les combattans fuſſent dénoncés, ils ſeroient ſans rémiſſion punis de mort auſſi bien que les témoins volontaires de leur combat.

L’inſulte faite entre quatre yeux n’en ſeroit pas une à moins que l’inſultant n’allât ſe vanter de l’avoir faite. L’inſulte alors deviendroit publique, & l’offenſé ſeroit en droit de ſe pourvoir : ſi l’offenſeur ne s’en vantoit pas il y perdroit le plaiſir barbare des Dueliſtes : plaiſir qui ne conſiſte qu’à ſe vanter d’avoir convaincu quelqu’un de lâcheté ou de peu d’adreſſe, & de ſe faire regarder comme un homme avec lequel il eſt dangereux d’avoir à faire.

Il n’eſt point d’abus qu’on ne détruiſe quand les loix qui les proscrivent ſont aſſés