Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/47

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que ſi elles arrivoient en effet dans l’eſpace de tems que dure la piéce, un avare quel qu’il fut, ſeroit infailliblement les mêmes choſes que fait Harpagon. La charge ne conſiſte effectivement que dans le laps de tems dont la briéveté ne laiſſe pas ſuppoſer l’aſſemblage actuel d’un ſi grand nombre d’incidens, mais elle n’eſt pas capable d’altérer la vérité des traits, c’eſt au contraire l’aſſemblage de ces traits vifs & vrais qui rend le tableau plus frappant, & qui force le ſpectateur d’appercevoir les inconvéniens du Vice ou du ridicule que l’on jouë : comment donc voulez vous que cette maniere d’inſtruire ſoit capable d’entretenir le Vice au lieu de le corriger & que le cœur des méchans en tire partie ? Si c’eſt là le genre de charge que vous attaquez vous ne réuſſirez ſans doute pas mieux à prouver le danger du ſpectacle.

Mais ſi vous me prouvez qu’un avare en devient plus avare pour avoir vu repréſenter celui de Moliére, un Roi pacifique & bienfaiſant, un Tyran déteſtable pour avoir vû repréſenter Atrée, un de nos Marquis plus ridicule qu’à ſon ordinaire pour avoir vû donner des naſardes à l’Épine dans le Joueur, & des coups de bâton à Maſcarille & à Jodellet dans les Précieuſes Ridicules, je conviendrai de bonne foi que le ſpedacle non ſeulement eſt mauvais pour les méchans, mais même je ſoutiendrai qu’il eſt dangereux : pour les bons.

À Londres, ditez-vous , un Drame intéreſſe en faiſant haïr les François, à Tunis la belle paſ-