Page:Dancourt - À Mr. J. J. Rousseau, 1759.djvu/51

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qu’on doit l’attention que nos intégres Magiſtrats font maintenant à leur conduite, on n’a pas ſurement attendu qu’ils fuſſent devenus honnêtes gens pour jouer leurs manœuvres en plein Théatre, ſi l’on n’a pas corrigé les Financiers de leur voracité, les Procureurs & les autres Commis ſubalternes de la Juſtice, de leur friponneries ; au moins par les avis qu’on a donnés au Public aux Magiſtrats & aux Miniſtres, a-t on ſuggeré à ceux-ci l’attention néceſſaire pour y mettre ordre, c’eſt ainſi qu’on a trouvé les Adminiſtrateurs du reméde ; vous objecterez à cela que vôtre reproche ſubſiſte toujours & qu’il eſt également bien fondé, puiſque le reméde n’eſt pas le Théatre qui opere la converſion de ceux qu’il accuſe, mais la ſévérité ſalutaire de leurs ſurveillans.

Un homme reçoit un coup d’épée, il eſt en danger de la vie, il tombe de foibleſſe, un paſſant charitable touché de ſon état vole chez un Chirurgien, l’amene & lui remet le bleſſé dans les mains, le Chirurgien tire cet homme d’affaire & lui ſauve la vie ; le paſſant en eſt il moins la cauſe premiere du ſalut de cet homme ?

Pour prouver que le Théatre purge les paſſions qu’on n’a pas & fomente celles qu’on a, vous dites qu’on n’oſe mettre ſur la ſcene un homme droit, vertueux, ſimple, groſſier & ſans galanterie, qui ne dit point de belles phraſes, il y a cependant longtems que Moliére a produit cet homme ſur la ſcene. Chriſale dans les fem-