viſa cependant de trouver que Mahomet fut juſtifié par ſa grandeur d’ame & ſa politique. J’entendois faire de toute part au poëme l’application de cette penſée de Lucrece.
Tantum Relligio potuit ſuadere malorum !
Quoi ! la Religion mene à de tels excès !
Vous voyez bien M. que le ſcrupule de mettre de grands Criminels ſur la Scene ſeroit puſillanime puisque les produiſant il en réſulte qu’on en conçoit un horreur plus forte pour le crime, & que l’effet que vous craignez que leur exemple ne produiſe, n’eſt qu’une chimere, puisqu’il ne s’eſt jamais manifeſté depuis tant de milliers d’ans que l’histoire, l’épopée, la Tragédie & la Scene mettent ſous les yeux des Scélérats ; mais Mahomet n’eſt point puni, non M. Et c’eſt juſtement en cela comme en bien d’autres choſes que M. de Voltaire doit voir comparer ſon génie à celui de Corneille, de Racine & de Crebillon, puisque comme eux c’eſt par la prospérité du crime qu’il a ſçu rendre ſon perſonnage encore plus abominable. Quel eſt l’homme vertueux qui n’égorgeroit pas un Scélerat auſſi déteſtable que Mahomet ? Vous l’aurez peut être trouvé un peu moins odieux qu’Atrée, & vous croirez M. de Voltaire moins digne de cenſure, parce que ſon impoſteur eſt en quelque façon puni par la mort de Palmire, & qu’il lui fait dire avec transport.