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CHANT XXXIII


ARGUMENT


Aventure d’Ugolin. Passage au troisième giron dit de Ptolomée, où sont punis les traîtres envers leurs bienfaiteurs.


Le fantôme suspendit son atroce repas, et, s’essuyant la bouche à la chevelure du crâne qu’il rongeait, prit ainsi la parole :

— Tu veux donc que je renouvelle l’immodérée douleur dont le souvenir seul me fait tressaillir avant que je commence : eh bien, s’il est vrai que mes paroles puissent tomber comme l’opprobre sur la tête du traître que je tiens, tu vas m’entendre sangloter et parler. Je ne sais qui tu es, ni comment te voilà : mais tu parais Florentin, si ta voix ne m’abuse. Or, quand tu sauras que je fus le comte Ugolin, et celui-ci l’archevêque Roger, tu sauras aussi pourquoi sa tête m’est livrée ; car tu n’ignores pas sans doute comment le perfide, m’ayant déjà trahi dans son cœur, me fit ensuite prendre et mettre à mort. Mais ce que tu ne peux avoir appris, c’est combien cette mort fut horrible : entends-moi donc, et tu pourras alors juger le crime et la vengeance. J’avais déjà compté plus d’un jour, à travers les soupiraux de la tour qui a mérité par moi