Page:Dante - La Divine Comédie, trad. Lamennais, 1910.djvu/377

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ciel il ouvrit les yeux, il rit de lui-même. Et si un vrai si secret révéla sur la terre un mortel, je ne veux pas que tu t’en étonnes : celui qui le vit là-haut [1] le lui découvrit, avec beaucoup d’autres vérités touchant ces chœurs. »


CHANT VINGT-NEUVIÈME


Lorsque les deux fils de Latone, couverts du Bélier et de la Balance, se font ensemble de l’horizon une ceinture [2], autant qu’en équilibre le Zénith [3] les tient de temps, jusqu’à ce que l’un et l’autre, changeant d’hémisphère, hors de cette ceinture se déséquilibrent [4] ; autant, avec un visage riant, Béatrice se tut, le regard fixé sur le Point qui m’avait vaincu [5] ; puis elle commença : « Je dis, et ne demande pas ce que tu veux ouïr [6], parce que je le vois dans le Point où aboutit tout ubi et tout quando [7] ; non pour qu’il acquière quelque bien, ce qui ne peut être, mais pour que, resplendissant, sa splendeur puisse dire : Je suis [8], dans son éternité,

  1. Saint-Paul.
  2. Lorsque le Soleil et la Lune, sous les signes opposés du Bélier et de la Balance, se trouvent respectivement situés aux deux extrémités de l’horizon, qui les entoure comme une ceinture.
  3. Nous lisons avec Cesari, d’après le manuscrit d’Udine, che il Zenit i libra. Le P. Lombardi lit : che li tiene in libra ; d’autres, che il Zenit in libra. Le sens, du reste, est le même.
  4. Lorsque les deux astres occupent les deux points opposés de l’horizon, ils sont en équilibre par rapport au Zénith, puisqu’ils en sont à égale distance, mais cet équilibre se rompt sitôt que, l’un montant dans notre hémisphère et l’autre descendant dans l’hémisphère opposé, l’horizon de chacun d’eux change. Béatrice se tut durant un espace de temps aussi court que celui pendant lequel ce changement s’opère.
  5. « Dont la splendeur m’avait forcé de baisser les yeux. »
  6. « Je réponds à ton désir, sans que tu l’aies exprimé. »
  7. Ubi, espace, lieu. — Quando, temps, époque.
  8. Nul être fini ne peut ajouter aucun bien au bien infini ; mais chacun d’eux réfléchissant à quelque degré la splendeur de l’Être divin, son image, il s’affirme lui-même dans cette image.