Page:Dante - La Divine Comédie, traduction Lamennais volume 1, Didier, 1863.djvu/173

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
161
INTRODUCTION.

des, conquête faite sur l’infini vide et sans forme. »

Le dernier trait, ce retour du pauvre aveugle sur lui-même, le regret de cette belle lumière refusée à ses yeux, qui roulent en vain pour rencontrer son rayon perçant, et ne trouvent point d’aurore ; ce sentiment si vrai, plein d’une mélancolie si profonde et si calme, touche, émeut comme tout ce qui sort spontanément du cœur de l’homme. Toutefois, en se tenant plus près de la nature telle qu’elle apparaît, quand fuient les ombres, à nos sens ravis, Dante, croyons-nous, dans la même peinture, l’emporte par l’image, la fraîcheur et l’éclat.

Au pied du mont, sur la rive, il rencontre un vieillard, digne, à le voir, de tant de révérence que plus à son père n’en doit aucun fils. Ce vieillard est Caton d’Utique, préposé à la garde du Purgatoire pour en repousser les damnés qui, fuyant l’éternelle prison, tenteraient d’y entrer.

Dante, ici, dominé par un sentiment plus fort qu’elle, paraît oublier la théologie et son dogme rigide, et il n’est pas, à beaucoup près, le seul qui, sur ce point, eût opposé à l’autorité la voix de la conscience. Saint Justin, au second siècle, d’autres, plus tard, alors qu’Aristote régnait souverainement dans l’École, ont cru au salut des anciens qui avaient observé fidèlement les préceptes de la loi naturelle. Or, les plus illustres de ses contemporains, et spéciale-