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INTRODUCTION.

ment les poëtes, si admirés de Dante, s’accordent à montrer dans Caton le juste par excellence, et le type même de la vertu. Ce que Lucain dit de lui rappelle le mot de Cicéron : charitas generis humani, et révèle le progrès immense accompli dans l’idée morale :

« Nul excès, suivre la nature, vivre pour la patrie, se croire né non pour soi, mais pour le monde entier, telle était la règle, la loi inébranlable du sévère Caton[1]. »

Les barrières qu’élevait entre les peuples le principe égoïste, le sentiment étroit des nationalités et des races, s’abaissent devant le grand dogme de l’unité du genre humain proclamée avec les devoirs qu’elle impose. Combien, déjà, l’on était loin des temps où le même mot signifiait étranger et ennemi !

Se souvenant peut-être des vers magnifiques où Horace peint le monde entier soumis, hors l’âme indomptable de Caton[2], Dante voyait encore en cet héroïque


  1. Hi mores, hæc duri immota Catonis
    Secta fuit, servare modum, finemque tenere,
    Naturamque sequi, patriæque impendere vitam,
    Nec sibi, sed toti genitum se credere mundo,…
    Justitiæ cultor, rigidi servator honesti :
    In commune bonus.

    Pharsat. lib. II.



  2. Audire magnos jam videor duces
    Non indecoro pulvere sordidos,
    Et cuncta terrarum subacta,
    Præter atrocem animum Catonis.

    Carm. lib. II od. 1.