Romain le martyr de la liberté qu’il aima plus que la vie même. Aussi est-ce au nom de cet amour immortel et sacré que Virgile prie l’austère vieillard d’être favorable à celui dont le ciel a voulu qu’il fût le guide à travers les royaumes des morts.
« Qu’il te plaise d’agréer sa venue : il va cherchant la liberté qui est si chère, comme sait celui qui pour elle la vie refuse.
« Tu le sais, pour elle ne te fut point amère la mort à Utique, où tu laissas le vêtement qui au grand jour sera si brillant[1]. »
Nulles paroles plus simples, et que de pensées, que de sentiments elles éveillent au fond de l’âme émue ! Hélas ! en tous les sens, que sommes-nous, que de pauvres misérables qui vont cherchant La liberté, la liberté de l’esprit asservi aux préjugés et à l’ignorance, la liberté du cœur esclave des passions, la liberté du corps livré aux caprices de maîtres insolents, la liberté dans tous les ordres, dans l’ordre intellectuel, l’ordre moral, l’ordre politique. Qu’est-ce que nos sociétés, qu’est-ce que le monde, sinon un noir sépulcre où la tyrannie, sous mille formes hideuses, nous enchaîne avec des ossements ?
Les deux voyageurs voient venir rapidement sur les eaux, guidée par un Ange resplendissant de lumière une légère nacelle pleine d’âmes qu’elle dépose sur la
- ↑ Purgat. ch. I, terc. 24 et 25.