Dans sa fuite éternelle, le temps emporte rapidement la vie. Chaque heure, donc, est précieuse pour en atteindre le vrai but. Aussi Dante et son guide se hâtent-ils d’accomplir leur voyage symbolique ; ils arrivent en un lieu où le mont leur cache le soleil. Difficile est le chemin, et inconnu d’eux.
« Vois là, dit Virgile, une âme qui, retirée à l’écart, seule, toute seule, regarde vers nous ; elle nous enseignera la voie la plus courte.
« Nous vînmes à elle. O âme lombarde, qu’altière et dédaigneuse était ta contenance, et le mouvement de tes yeux digne et lent !
« Elle ne disait rien, mais nous laissait aller, regardant seulement, comme le lion lorsqu’il repose.
« Cependant Virgile s’approcha d’elle, la priant de nous montrer la plus facile montée. Elle ne répondit point à sa demande ;
« Mais elle s’enquit de notre pays et de notre vie ; et comme le doux Guide commençait : — Mantoue, l’ombre, tout enfoncée dans la solitude d’elle-même,
« Surgit vers lui, du lieu où elle était, disant : — O Mantouan, je suis Sordello, de ton pays ; et ils s’embrassèrent l’un l’autre[1].»
La solitude de cette ombre retirée à l’écart, sa contenance altière, le lent mouvement de ses yeux, saisit
- ↑ Purgat., ch. VI, terc. 20 et suiv.