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INTRODUCTION.

maître des âmes, l’autre des corps, l’un commandant à la volonté dépendante des croyances, l’autre aux organes qui ne peuvent être mus que par cette volonté : qu’est-ce que cela, sinon l’affirmation simultanée des contradictoires, sinon le chaos absolu ? D’une part, une pensée et une volonté sans action, de l’autre, une action sans pensée et sans volonté qui appartiennent à l’être agissant. Car, en a-t-il qui lui soient propres ? déterminant lui-même alors celles qu’il juge de son ressort, il échappe au pouvoir spirituel, il devient, quant à soi, ce pouvoir même ; — lui est-il, au contraire, soumis dans la sphère de l’intelligence ? il n’est plus en ses mains qu’un instrument matériel, aveugle.

L’histoire confirme ici l’enseignement de la pure raison. Cette réciproque indépendance, laquelle brise l’unité sociale comme briserait l’unité humaine l’indépendance mutuelle du corps et de l’esprit, qu’a-t-elle produit alors qu’admise théoriquement, elle formait en Europe la base du droit public ? Une lutte violente pour reconstituer l’unité brisée, des guerres atroces, un débordement de fléaux pareils à ceux qu’amena l’invasion des Barbares. Tels furent les effets permanents de ce que l’on appelait la concorde du sacerdoce et de l’empire, espèce de pierre philosophale de la théologie, dont le gallicanisme, dans ses espérances aussi naïves qu’infatigables, n’a cessé de poursuivre la recherche.