Page:Dante - La Divine Comédie (trad. Artaud de Montor).djvu/391

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Et voilà que je vis naître au delà des splendeurs qui brillaient comme le soleil à l’horizon, une autre lueur d’un éclat pareil ; et de même qu’au commencement de la nuit, on voit dans le ciel apparaître confusément des étoiles, il me sembla que je découvrais de nouvelles substances qui formaient une autre couronne, près des deux premiers cercles de bienheureux.

Ô véritables étincelles de l’Esprit-Saint ! de leur lumière blanchâtre elles éblouirent tout à coup mes yeux, qui, convaincus, ne purent souffrir cet éclat. Béatrix se montra plus belle et plus riante ; mais, parmi tant de prodiges, il faut laisser ceux que n’a pu conserver ma mémoire.

Mes yeux reprirent cependant quelque force, et je me vis alors transporté, seul, avec Béatrix dans un plus haut salut. Je m’en aperçus aisément à l’éclat de cet autre ciel, qui me parut plus enflammé. De toutes les facultés de mon âme, et avec ce sentiment intime qui appartient aux hommes de toutes les nations, j’offris à Dieu un sacrifice de remercîments, tel que pouvait l’exiger cette faveur nouvelle.

Mes actions de grâces n’étaient pas achevées, que je sentis qu’elles avaient été agréées. Des lumières d’une couleur de pourpre éblouissante m’apparurent entre deux rayons, et je m’écriai : « Que tu es grand et généreux, ô Élios, toi qui les embellis ainsi ! »

Semblables à Galaxie qui, ornée de grandes et de petites constellations, répand une ligne de blancheur entre les pôles du monde, sujet de tant de doutes parmi les plus sages, ces rayons parsemés d’étoiles formaient sur la profondeur de la planète de Mars le signe vénérable, et me paraissaient diviser cette planète en quatre parties presque égales. Ici l’expression manque à ma mémoire. Dans cette croix brillait le Christ, d’un éclat que je ne puis comparer à aucun autre éclat.

Mais celui qui prend sa croix, et suit le Christ excusera mon silence, lorsqu’il verra lui-même, dans cet arbre, étinceler le Christ.

Aux deux côtés ainsi qu’aux deux extrémités, brillaient des splendeurs scintillantes qui se confondaient les unes avec les autres, de même qu’on voit des atomes, lents et légers, et d’un mouvement irrégulier, s’agiter sur un rayon de lumière qui traverse encore l’ombre que l’art et la science cherchent à nous procurer, pour nous défendre de la chaleur.

Comme une lyre et une harpe exactement d’accord produisent un tin tin délicieux, même pour celui qui est étranger à l’étude de la musique, de