Page:Dante Alighieri - La Vie nouvelle, traduction Durand Fardel.djvu/56

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Tu as détruit la grâce amoureuse
D’une jeunesse joyeuse.
Je ne veux pas découvrir ici davantage la femme
Dont les mérites sont bien connus.
Celui qui ne mérite pas son salut[1]
Qu’il n’espère jamais être en sa compagnie[2].


CHAPITRE IX


Quelques jours après la mort de cette femme, il survint une chose qui m’obligea de quitter la ville et de me rendre vers l’endroit où était cette aimable femme qui avait servi à protéger mon secret, car le but de mon voyage n’en était pas très éloigné. Et quoique je fusse en apparence en nombreuse compagnie, il m’en coûtait de m’en aller, à ce point que mes soupirs ne parvenaient pas à dégager l’angoisse où mon cœur était plongé dès que je me séparais de ma Béatitude.

Or, le doux Seigneur[3], qui s’était emparé de moi par la vertu de cette femme adorable, m’ap-

  1. C’est à Béatrice que s’adressent ces deux derniers vers. Vivre en sa compagnie, c’est-à-dire dans le ciel.
  2. Commentaire du ch. VIII.
  3. L’Amour.