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sonnel veulent qu’il s’explique d’une manière claire et précise sur les faits à lui imputés ; qu’il établisse lumineusement sa justification sur chaque reproche à lui fait, et ce n’est que lorsqu’il a porté la conviction dans l’âme de ses juges, qu’il devient digne de quelque foi, et peut se permettre des dénonciations contre des hommes investis de la confiance publique ; je vous invite donc à vous renfermer dans votre défense et à n’y rien joindre d’étranger.

C’est la Convention tout entière qui vous accuse, je ne crois pas qu’il entre dans votre plan d’en faire suspecter quelques-uns ; car en admettant le bien fondé de ces soupçons envers quelques individus, l’accusation portée contre vous en nombre collectif n’en serait nullement affaiblie.

Réponse. — Je reviens à ma défense. Il est de notoriété publique que j’ai été nommé à la Convention en très petite minorité par les bons citoyens, et que j’étais odieux aux mauvais.

Lorsque Mirabeau voulut s’en aller à Marseille, je pressentis ses desseins perfides, je les dévoilai et le forçai de demeurer au fauteuil, et c’est ainsi qu’il était parvenu à me saisir, à m’ouvrir la bouche ou à me la fermer ! C’est une chose bien étrange que l’aveuglement de la Convention nationale, jusqu’à ce jour sur mon compte, c’est une chose vraiment miraculeuse que son illumination subite !

Le Président. — L’ironie à laquelle vous avez recours ne détruit pas le reproche à vous fait de vous être couvert en public du masque de patriotisme pour tromper vos collègues et favoriser secrètement la royauté. Rien de plus ordinaire que la plaisanterie, les jeux de mots aux accusés qui se sentent pressés et accablés de leurs propres faits sans pouvoir les détruire.

Réponse. — Je me souviens effectivement d’avoir provoqué le rétablissement de la royauté, la résurrection de toute la puissance monarchique, d’avoir protégé la fuite du tyran, en m’opposant de toutes mes forces à son voyage de Saint-Cloud, et faisant hérisser de piques et de baïonnettes son passage, en enchaînant en quelque sorte ses coursiers fougueux ; si c’est là se déclarer le partisan de la royauté, s’en montrer l’ami, si à ces traits on peut reconnaître, l’homme favorisant la tyrannie, dans cette hypothèse, j’avoue être coupable de ces crimes. J’ai dit à un patriote rigide, dans un repas, qu’il compromettait la bonne cause en s’écartant du chemin où marchaient Barnave et Lameth, qui abandonnaient le parti populaire.