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CHAPITRE II.

secrets enveloppés d’une sainte obscurité ; car ce n’est point abaisser, c’est relever au contraire les célestes beautés que de les dépeindre sous des traits évidemment inexacts, puisqu’on avoue par là qu’il y a tout un monde entre elles et les objets matériels.

Que ces défectueux rapprochements aident notre pensée à s’élever, c’est, je crois, ce qu’un homme réfléchi ne voudra pas nier ; car il est probable que de plus majestueux symboles séduisent certains esprits qui se représentent les natures célestes comme des êtres brillants d’or et d’un splendide éclat, riches, magnifiquement vêtus, rayonnants d’une douce lumière, enfin affectant je ne sais quelles autres formes que la théologie prête aux bienheureux archanges. C’est afin de désabuser ceux qui ne soupçonnent rien au-dessus des beautés du monde sensible, et pour élever sagement leur pensée, que les saints docteurs ont cru devoir adopter ces images si dissemblables ; car ainsi les formes abjectes ne peuvent séduire sans retour ce qu’il y a de matériel en nous, parce que leur grossièreté même réveille et soulève la partie supérieure de nos âmes ; et de la sorte ceux mêmes qui sont épris des choses terrestres jugent faux et invraisemblable que de si difformes inventions ressemblent aucunement à la splendeur des réalités célestes et divines. Du reste il faut se souvenir que rien de ce qui existe n’est radicalement dépouillé de quelque beauté ; car toutes choses sont éminemment bien, dit la vérité même[1].

IV. Toutes choses donc offrent matière aux plus nobles contemplations ; et il est permis de présenter le monde purement spirituel sous l’enveloppe si peu

  1. Genèse, 1, 31.