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XXI
INTRODUCTION.

aussi comment son style n’est pas sans reproche. Donc sous ce point de vue, comme sous tous les autres, notre opinion soutient l’examen de la critique ; et il est au moins permis de la réputer vraisemblable : à moins toutefois qu’on ne veuille dire qu’en diminuant de deux cents ans l’antiquité de ces livres, on leur trouverait encore la physionomie que nous leur voyons. Car plusieurs monuments de l’école néo-platonicienne sont à peu près de même style : ce qu’il est facile de constater par la lecture des œuvres de Plotin, de Proclus et des fragments qui nous restent d’Hérennius. Mais cette objection, quelque force qu’on lui suppose, prouve simplement qu’à envisager sous un certain rapport la forme littéraire des écrits de saint Denys, on serait obligé de leur assigner une date flottante, qui se fixe à quel point l’on veut d’une période de trois siècles. À coup sûr, il ne suit pas de là qu’ils n’aient pu être composés par quelque contemporain des apôtres : c’est pourtant ce qu’il faudrait établir. D’ailleurs, quel livre a paru le premier, celui des Noms divins ou celui des Ennéades ? Plotin a pu copier le vrai saint Denys, comme un faux saint Denys a pu copier Plotin. Or, pour la solution de ce doute, doit-on croire la critique ancienne qui affirme que Proclus emprunta à notre auteur ses pensées et même ses paroles[1], ou la critique moderne qui présume que celui-ci a peut-être fait des emprunts à celui-là ? Le lecteur jugera lui-même. J’observerai seulement que, dans la seconde opinion même, nos livres ne seraient pas dépouillés de cette note intrinsèque d’authenticité que présente le style : voilà tout ce qu’il nous suffit de conclure pour le présent.

Mais ne serait-ce point une preuve de supposition que l’obscurité et la magnificence, deux caractères si marqués du style de saint Denys, et que ne présentent nullement les autres écrits de nos premiers docteurs, et en particulier des apôtres ? En effet, rien de simple et de transparent

  1. Pachymeres in proœmio ad opera sancti Dionysii.