divins furent composés par quelque saint Denys, tout autre que notre Aréopagite ? Des nombreux homonymes qu’on lui connaît, deux seulement peuvent être en cause, Denys de Corinthe et Denys d’Alexandrie. Mais, d’abord, il faudrait admettre que ces glorieux pontifes, honorés comme saints par l’Église entière, ont passé leur vie à ourdir un tissu d’inutiles mensonges. Ensuite Denys de Corinthe avait un style tout différent du style de l’évêque d’Athènes, comme on peut le voir par les fragments qui nous restent de lui[1]. Puis il était presque son contemporain, et Érasme ne gagnerait rien à diminuer de soixante ans l’antiquité des livres, objet de la discussion. Pour Denys d’Alexandrie, d’après le témoignage de saint Maxime, cité plus haut, il est auteur de commentaires sur les œuvres dont nous examinons l’origine : c’est une preuve manifeste que les œuvres elles-mêmes ne doivent pas lui être attribuées.
En second lieu, comment penser qu’Apollinaire ait écrit ces livres ? Ce n’est pas d’après le texte qui dit en mille manières le contraire. Ce n’est pas d’après l’autorité de quelques écrivains ; on n’en cite aucun. Ce n’est pas enfin d’après la conformité qui se trouverait entre les ouvrages qu’a certainement composés l’évêque de Laodicée et ceux qu’on lui prête ; les hérétiques assertions des premiers sont directement réfutées par la sévère orthodoxie des seconds. Ainsi Apollinaire enseignait que le Verbe s’est fait homme par changement substantiel de la divinité en l’humanité ; qu’il a pris un corps, mais non pas en même temps une âme humaine ; que même ce corps n’était pas véritable, mais céleste et non formé du sang très-pur de la sainte Vierge : toutes erreurs nettement contredites par saint Denys[2]. Cette évocation d’Apollinaire, pour résoudre la question qui nous occupe, est donc une