Page:Darien, Bas les coeurs, Albert Savine éditeur, 1889.djvu/255

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argent qu’il distribue entre les Français. Ah ! il n’y a pas de danger qu’il en donne un sou aux Allemands ! Tout pour les nôtres ! On peut se fier à lui pour ça. Tout le monde le sait. Vous connaissez l’abbé Chrétien ?

― Je l’ai vu. Il a une sale tête.

― Vous trouvez ? C’est un bien brave homme. Et un patriote ! Je ne vous dis que ça…

Nous arrivons au Château. Nous passons devant la galerie des maréchaux où est installée l’ambulance. Nous passons et nous repassons, et M. Legros, qui regarde par toutes les fenêtres, n’aperçoit pas l’abbé Chrétien.

― C’est qu’il n’est pas là… c’est qu’il n’est pas venu… Ah ! voilà une sœur de charité.

Il lui fait signe. Deux minutes après, la sœur ouvre la porte et s’approche de nous. Elle a, sous la cornette, une belle figure triste et pâle.

― Ma sœur, dit le marchand de tabac, je voudrais vous remettre un peu d’argent… un peu d’argent pour les blessés… D’habitude, je donne la même somme, tous les huit jours, à l’abbé Chrétien…

Il allonge la pièce de cent sous vers la main qu’a tendue la sœur.