— C’est vous qui vous êtes fait porter malade ? Où avez-vous mal ?
— Partout, monsieur le major.
— Mais enfin, de quoi vous plaignez-vous ? De quoi souffrez-vous ?
— De la fatigue. Je n’en puis plus.
— Ce n’est pas une maladie, cela. Voyons, vous n’avez pas autre chose ?
— Mais, monsieur le major, examinez-moi. Je vous assure que je suis exténué, brisé, éreinté. Je n’ai plus trois gouttes de sang dans les veines. Mes jambes ne peuvent plus me porter…
Un flot de paroles désespérées.
— Mon ami, vous êtes peut-être fatigué, je n’en disconviens pas. Seulement, pour moi, cela ne suffit point. Je ne puis vous reconnaître malade.
Et, se tournant vers le chef de poste, le major ajoute :
— Sergent, vous pouvez commander à cet homme de continuer son exercice.
Et il s’en va, tranquillement, les paillettes d’or de son képi éclatant au soleil au-dessus de la bande de velours ; frappant sa botte, à petits coups, de sa cravache à pomme d’argent.
— Queslier, placez-vous le premier… en tête !… Pas gymnastique, marche !
Le malheureux fait cinq ou six pas en titubant.
— Nom de Dieu ! Plus vite que ça ! Marchez-lui sur les talons, Froissard.
Queslier s’arrête et laisse tomber son fusil. J’essaye de lui donner du courage ; mais je sens qu’il ne peut