Page:Darien - L’Épaulette, Fasquelle, 1905.djvu/341

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qu’un divorce seul pourra nous permettre. Je vous proposerais bien de me faire pincer en flagrant délit d’adultère avec la première guenon venue. Malheureusement, c’est impossible ; cet acte immoral au premier chef m’enlèverait la confiance de mes clients ; et j’ai besoin de leur confiance. Il faudra donc vous dévouer et entendre le divorce prononcé en ma faveur. Cela, dans l’état actuel des mœurs parisiennes et parlementaires, ne saurait vous gêner. Quand vous serez madame Courbassol…..

Mme Hardouin sursaute.

— Il faut que vous soyez Madame Courbassol, prononce lentement le notaire. Il le faut. Prenez vos précautions ; au besoin, je vous aiderai. Je regarde donc la chose comme faite ; et je vous considère dès ce moment comme l’épouse divorcée du sieur Hardouin, femme Courbassol. Maintenant, écoutez bien. Dès que la Loi vous a liée à Courbassol, c’est-à-dire après que j’ai eu le temps de jouer le rôle de victime qui me vaudra considération et confiance, je lève le pied avec les fonds de mes clients. Je mets ces fonds en lieu sûr, et je me constitue prisonnier. Je suis jugé, condamné, le tout conformément aux usages du notariat, et incarcéré. C’est ici que je compte sur vous. Il faudra que, grâce à Courbassol et aux influences dont il dispose, vous me fassiez évader. Ces choses-là se font assez souvent avec la connivence du gouvernement. Je passerai pour mort, si l’on veut. Et je pourrai entreprendre tranquillement à l’étranger, et à l’abri de toutes demandes d’extradition, un petit trafic conforme à mes aptitudes réelles. La chose vous convient-elle, en principe ?

— Mon Dieu ! murmure Mme Hardouin au bout d’un instant, tout ce que vous venez de me dire m’étourdit tellement…

— Des étourdissements ne constituent pas une solution, ricane le notaire. Vous avez à choisir. La conti-