Ça ira. Quand on pense à ça, quand on sait ça, quand on voit ça, les palais de la Danse du Ventre et les murailles qui sont derrière n’inspirent ni colère ni dégoût. Si je puis me permettre cette expression hautement métaphorique, il suffirait de faire sauter ces pierres crevassées et ces plâtras pour que le chaos indispensable fût produit et qu’un monde régénéré prît la place du monde putréfié où nous avons l’infortune de vivre. Ça ira.
Ça ira en France, d’abord ; à moins que la France ne préfère rendre à Dieu la belle âme que lui ont confectionnée l’Église et l’État. C’est en France surtout que la nouvelle vie, en dépit des apparences, est prête à éclore : c’est en France que la vie misérable, cadavérique, que le despotisme fait aux peuples, est surtout près de s’éteindre, de sombrer dans une imbécillité paralytique à laquelle deux remèdes, seulement, peuvent s’offrir : la Conquête ou la Révolution. L’antagonisme entre les partisans de la vie libre et les partisans de la vie servile est plus profond en France qu’ailleurs ; il est souvent latent, mais il est irréconciliable ; aucune entente entre les uns et les autres n’est possible. À la première occasion, un conflit éclatera, qui sera décisif. Le chaos sera produit.
Aujourd’hui, ce n’est point le chaos qui règne en France : c’est l’incohérence. Les hommes qui se succèdent au pouvoir cherchent en vain à donner au monde et au pays lui-même l’illusion d’un état social et politique normal. Personne ne peut s’y tromper. Il est certain que l’ordre est partout fictif : souvent même sa simple apparence n’existe pas, ou n’existe que d’une façon ridicule. Les fantoches qui s’appellent des républicains, adorateurs fétichistes de principes qui ont perdu toute signification, sont affectés d’une danse de Saint-Guy qui laisse peu d’espoir, et qui donne l’idée d’une danse macabre. Les nationalistes, à plat ventre sur les dalles qui recouvrent la pourriture des traditions criminelles, se livrent à tous les soubresauts épileptiques qu’on peut attendre des convulsionnaires de la sottise à dents longues. C’est l’incohérence, à tous les points de vue, qui caractérise les par-