Page:Darien - La Belle France.djvu/295

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

religieux ; il leur faut du cabotinage partout ; ça leur est devenu bien égal, de crever de faim !

L’Église veille à ce que ça leur soit égal. Elle veille sur eux en Sainte Mère, en bonne mère de famille. Elle leur a donné une belle légende, une belle Révolution. Cette Révolution fait le bonheur des Riches ; chose naturelle ; et, chose beaucoup plus curieuse, elle fait aussi le bonheur des Pauvres. Elle ne leur a pas donné de pain, mais elle leur a donné des droits. Quels droits ? Tous les droits. Le droit de choisir leurs affameurs ; de se passer de patrie ; de se passer de pain. Les pauvres, fiers de leurs droits, et qu’on a munis d’une belle charnière au bas du dos — c’est pour saluer les grands principes — claquent du bec fort poliment, sans jamais faire grincer leurs dents. Ils attendent tout, eux aussi, du libre jeu des institutions dont nous dota 89. Et il n’y a qu’une institution dont ils ne se souviennent plus, et qui serait fort utile, cependant, en ces temps de Nationalisme : celle du rasoir national. On vous en foutra, des grands couteaux, pour les perdre !

Ce ne sont pas seulement les six longues années de la Révolution qui furent sans profit pour les pauvres ; le siècle entier qui suivit ces années d’insurrections et de tribulations n’apporta que des aggravations au sort des malheureux. Depuis cent ans, la Révolution Française est un énorme boulet rivé à leur pied par la coutume bête, et surtout, je dois le dire, par la vanité imbécile. Avoir fait la Révolution !… Quant à savoir ce qu’avait été cette Révolution, c’était de fort peu d’importance ; elle avait été la continuation logique de tous les mouvements libertaires qui l’avaient précédée, et particulièrement de la Réforme ; elle avait ouvert la route du progrès à une humanité nouvelle ; elle avait été une conséquence et une cause ; elle avait été un phare éclairant, des deux côtés, l’évolution du genre humain. Elle avait été ceci, cela ; et même la revanche des Latins contre la féodalité germanique. Je ne dénombrerai pas ces âneries ; l’explication donnée par Beaconsfield est peut-être la moins sotte de