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II


Il n’y a rien de plus terrible que de voir l’Ignorance agissante.
Goethe.


Il y a quelque chose de plus terrible encore à contempler que l’Ignorance agissante. C’est l’Ignorance qui n’agit pas, mais qui braille ; l’ignorance hargneuse, aveugle, jalouse, fielleuse et lâche, qui recule devant l’action et ne vit que de bravades, de déclamations et de vantardises. On a pu l’admirer en France, cette ignorance-là, et dans toute sa splendeur, depuis trente ans. À certaines époques, notamment, telles que celle du boulangisme et l’époque actuelle. C’est comme un bubon, gros de rancunes, de rages, d’envies et d’impuissances, qui crèverait subitement et dont le pus empoisonnerait la nation presque tout entière.

Il est certain que la situation déplorable dans laquelle se trouve la France ne peut être supportée continuellement avec patience ; il faut de temps en temps qu’un exutoire s’ouvre aux colères, aux énervements, et aussi aux lassitudes accumulées. Le peuple français, songez-y, vit depuis plus d’un quart de siècle avec la conviction que les revers qu’il a subis sont irréparables ; avec la certitude qu’il ne recouvrera jamais les provinces qu’il a perdues, au moins par la force, et que la revanche est utopique ; et non sans la conscience de l’impossibilité qu’il y a pour lui