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Page:Darien - Le Voleur, Stock, 1898.djvu/325

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XX

OÙ L’ON VOIT QU’IL EST SOUVENT DIFFICILE DE TENIR SA PAROLE


Je suis assis auprès du feu, devant la chaise que vient de quitter Charlotte, confondu d’étonnement, accablé d’horreur. Ah ! le mensonge des conjectures, la fausseté des suppositions ! Toutes mes hypothèses sont renversées, toutes mes prévisions en déroute. La vie est donc plus atroce encore qu’on ne peut le présager, plus abjecte et plus cruelle !… Et je reste éperdu de stupeur devant l’inattendu — devant la réalité toujours implacable et toujours imprévue…

Non, Charlotte ne s’est pas mariée. Non, rien de ce que j’avais imaginé ne s’est accompli. Et ce qui est arrivé… oui, cela devait être, cela, et cela seulement. Pas autre chose n’était possible. Oh ! je n’y puis croire encore, pourtant… Charlotte chassée par son père, le jour même où eut lieu la scène affreuse qui nous a séparés ; son courage devant l’affliction, sa fermeté de cœur devant l’épreuve, sa foi en elle-même ; et la résolution fière qu’elle sut prendre de maîtriser sa douleur et de refouler ses angoisses, et d’affronter le