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LE VOLEUR

— On se serait cru en plein mois d’août.

— Oui, Monsieur.

— Vous ne craignez pas les grandes chaleurs, Mademoiselle ?

— Non, Monsieur.

— Beaucoup de gens s’en trouvent incommodés.

— Oui, Monsieur…

Mon oncle parle de l’intention qu’il a de faire remonter pour Charlotte plusieurs des bijoux que lui a laissés sa mère.

— Quelle chose incompréhensible, dit Mme Montareuil, que ces perpétuels changements de mode dans la joaillerie ! Et ce qu’on fait aujourd’hui est si peu gracieux ! Il faut que je vous montre une broche qui me fut donnée lors de mon mariage, et vous me direz si l’on fait des choses pareilles à présent.

Elle se lève pour aller chercher la broche dans son appartement. Mon oncle est radieux, plein d’attentions pour moi ; le mariage de Charlotte, me dit-il, n’est plus qu’une question de jours ; et comme il m’assure, sans rire, qu’il découvre à chaque instant dans Édouard de nouvelles qualités, Mme Montareuil rentre dans le salon.

— J’ai été un peu longue. Les petits arrangements de mon secrétaire ont été bouleversés depuis ce matin ; il fallait bien trouver de la place pour les valeurs que j’ai retirées de la Banque afin de faire opérer les transferts, et je suis légèrement maniaque, vous savez. Voici la broche. Qu’en dites-vous ?

Beaucoup de bien, naturellement. Pourquoi en dire du mal ? Mme Montareuil referme l’écrin avec la joie de la vanité satisfaite.

— Je ne l’ai pas portée depuis dix ans, dit-elle. Je la mettrai demain, pour les courses. Vous viendrez aussi à Maisons-Lafitte, j’espère, monsieur Georges ?

— Non, Madame ; je le regrette ; mais j’ai déjà expliqué à mon oncle les raisons qui ne me permettent pas d’accepter son invitation. Je dois partir en Belgique demain soir.