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MOUVEMENTS DES FEUILLES.

deux jours après, il avait plu fortement dans l’intervalle ; il trouva que quelques-uns de ces insectes avaient disparu, mais que beaucoup d’autres avaient été poussés vers les bords, qui s’étaient complètement refermés sur eux et dont les glandes sécrétaient alors sans aucun doute. Ceci nous explique comment il se fait que l’on trouve ordinairement un si grand nombre d’insectes et de fragments d’insectes dans le canal formé par les bords recourbés des feuilles.

L’inflexion du bord, dû à la présence d’un objet excitant, doit rendre à la plante des services probablement plus importants à un autre point de vue. Nous avons vu que, quand on place sur la feuille de gros morceaux de viande ou d’éponge imbibée de suc de viande, le bord ne peut pas les envelopper en se recourbant ; mais, à mesure qu’il s’infléchit, il pousse très-lentement ces morceaux vers le centre de la feuille et les amène à une distance du bord qui s’élève au moins à 0,1 de pouce (2,54 millim.), c’est-à-dire qu’il leur fait parcourir un tiers ou un quart de la distance qui sépare le bord de la nervure centrale. Un objet quel qu’il soit, un insecte assez gros, par exemple, doit être ainsi placé lentement en contact avec un bien plus grand nombre de glandes et provoquer ainsi beaucoup plus de sécrétions et d’absorptions qu’il n’y en aurait eu autrement. Nous pouvons conclure que c’est là une qualité très-utile à la plante, car le Drosera a acquis une faculté de mouvement très-développée dans le seul but de pouvoir placer toutes ses glandes en contact avec les insectes capturés. De même, quand une feuille de Dionée a capturé un insecte, la pression lente qu’exercent l’un sur l’autre les deux lobes ne sert qu’à placer les glandes des deux côtés en contact avec cet insecte et provoque aussi la répartition de la sécrétion, chargée de matières animales, sur toute la surface de la feuille, au moyen de l’attraction capillaire. Chez le Pinguicula, dès