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REMARQUES PRÉLIMINAIRES

inférieurs, j’ajouterai que, lorsque les habitants de la Terre de Feu trouvent une baleine échouée sur la plage, ils en ensevelissent dans le sable la plus grande partie, et, lors des famines auxquelles ils sont fréquemment exposés, ils reviennent de fort loin pour en chercher les restes à demi putréfiés.

On a souvent remarqué[1] que ni l’Australie, ni le cap de Bonne-Espérance — quoique les espèces indigènes y abondent, — ni la Nouvelle-Zélande, ni l’Amérique au sud de la Plata et selon quelques auteurs au nord du Mexique, ne nous ont fourni une seule plante utile. À l’exception du blé des Canaries, je ne crois pas que nous ayons tiré aucune plante comestible ou de quelque valeur, d’une île océanique ou inhabitée. Si presque toutes nos plantes utiles, natives d’Europe, d’Asie et de l’Amérique du Sud, avaient primitivement existé dans leur état actuel, l’absence complète de plantes utiles semblables dans les grands pays que nous venons de nommer, serait certes un fait bien étonnant. Mais, si ces plantes ont été assez profondément modifiées et améliorées par la culture pour ne plus ressembler de près à aucune espèce naturelle, nous pouvons comprendre pourquoi les contrées ci-dessus mentionnées ne nous ont fourni aucune plante utile, car elles étaient habitées par des hommes qui, comme en Australie et au Cap, ne cultivaient pas du tout la terre, ou ne la cultivaient que très-imparfaitement, comme dans certaines parties de l’Amérique. Ces pays produisent bien des plantes utiles à l’homme sauvage ; le Dr Hooker[2] n’en énumère pas moins de 107 qui sont dans ce cas dans la seule Australie ; mais ces plantes n’ont pas été améliorées, et ne peuvent par conséquent pas lutter avec celles qui, depuis des milliers d’années, ont été cultivées et perfectionnées dans le monde civilisé.

Le cas de la Nouvelle-Zélande, île magnifique à laquelle nous ne devons encore aucune plante un peu généralement cultivée, peut paraître en opposition avec cette manière de voir, car, lors de sa première découverte, les naturels cultivaient bien certaines plantes ; mais tous les investigateurs admettent, en conformité des traditions des indigènes, que les

  1. De Candolle a résumé les faits d’une manière fort intéressante dans sa Géographie botanique, p. 986.
  2. Flora of Australia, introduction, p. 110.